Unité Laïque
Contre la bienveillance

Yves Michaud, Contre la bienveillance, Stock, 190 p., 18 €

Philosophe, fondateur de l’Université de tous les savoirs, Yves Michaud est de longue date un spécialiste de la violence, à laquelle il a consacré de nombreux écrits. Il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages d’esthétique et a même dirigé les Beaux-Arts à la fin du précédent siècle. Publié au printemps dernier, Contre la bienveillance a été écrit pendant l’été 2015. Ni le Bataclan et les terrasses, ni a fortiori Magnanville, Nice et St-Etienne du Rouvray n’étaient venu éclairer l’analyse pénétrante que propose ici l’auteur. Pour résumer, la thèse est la suivante : la puissance du fondamentalisme religieux, la montée des populismes de droite comme de gauche, le discrédit de la classe politique, le rejet de la construction européenne rendent caducs les schémas anciens. En particulier l’idée que la démocratie, à force de bienveillance, peut tolérer toutes les différences toutes les croyances. Pour Michaud, il y a des croyances insupportables et intolérables et le populisme n’est pas une illusion qui se dissipera d’elle-même avec de la pédagogie. La bienveillance n’est pas de mise dans ce contexte pour bâtir une communauté politique.

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Un silence religieux. La gauche face au djihadisme

Jean Birnbaum, Un silence religieux. La gauche face au djihadisme, Seuil, 240 p., 17 €

Ce livre aborde un sujet qui, par définition, est ignoré. Celui du déni dont la gauche française fait preuve vis-à-vis de l’intégrisme islamiste. Directeur du Monde des Livres, Jean Birnbaum appartient à ce camp –la gauche- et il ne s’agit pas ici du brulot d’un « néo-réac » dont certains titres de presse aiment à dresser la liste. Pour autant, l’auteur fournit là un constat cruel qui lui vaudra peut-être de rejoindre la catégorie des « pseudo-intellectuels », celle qui se situe juste avant les « néo-réacs », tant il est vrai qu’il est bien vu dans certains milieux de gauche d’exprimer un faible pour le fondamentalisme musulman.

Birnbaum part des attentats de janvier 2015. Responsables politiques comme commentateurs et intellectuels, beaucoup à gauche étaient d’accord pour affirmer que ces actes n’avaient selon eux rien à voir avec l’islam : « Les djihadistes avaient beau se réclamer du djihad, leurs actions ne devaient en aucun cas être reliées à quelque passion religieuse que ce fut ». Alors, « tous les qualificatifs étaient bons pour écarter la moindre référence à la foi : barbares, énergumènes, psychopathes ». Et l’auteur de dresser la liste qui attestait de cette absence affirmée de lien : monstres sanguinaires, produits d’un désordre mondial dont l’Occident est responsable, victimes de la crise, personnalités fragiles, gamins des cités qui ont mal tourné, preuve de la panne de notre modèle d’intégration, héritiers de la vogue humanitaire, jeunes qui étouffent dans une société de vieux, enfants d’internet et des jeux vidéo, produits de la société du spectacle… Pour Birnbaum, « l’affaire semblait entendue : de même que l’islamisme n’avait « rien à voir » avec l’islam, le djihadisme était étranger au djihad. Tant et si bien que, depuis les attentats de janvier 2015, on a envisagé toutes les explications, toutes les causalités possibles, sauf une : la religion ».

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