Nadia Geerts, anatomie d’une lapidation
Unité laïque Communiqué de presse du 10 avril 2021.
NADIA GEERTS, ENCORE UNE ENSEIGNANTE LAÏQUE ACCULÉE ET MENACÉE PAR LE FANATISME ISLAMISTE.
L’association UNITÉ LAÏQUE apporte son entier soutien à Nadia Geerts, professeur agrégée en philosophie, maître-assistante en philosophie et en morale à la Haute École[1] Bruxelles-Brabant.
Après les incidents qui se succèdent en France depuis des années dans le silence du « pas-de-vague » de l’Éducation nationale, et qui n’ont dû leur publicité qu’à l’effroyable assassinat de Samuel Paty, après les menaces contre Didier Lemaire et la démission d’un professeur du collège Les Battières à Lyon, avant même le cas d’un enseignant britannique désormais obligé de fuir (!) ciblé et lâché par sa hiérarchie pour avoir osé montré la caricatures d’un prophète, l’incendie qui flambe dans tous les systèmes d’enseignement d’Europe se déplace en Belgique, pour y faire régner la peur et intimider les enseignants laïques.
Le cas de Nadia Geerts est exemplaire des méthodes des intégristes, de leur manipulation des idiots utiles qui les servent et de la lâcheté décourageante dont font preuve, en France, en Angleterre, en Belgique, les autorités publiques de rang intermédiaire face à cette insupportable violence morale et physique, pouvant aller jusqu’à la mort des « coupables ».
Nadia Geerts est connue et respectée pour la clarté de ses engagements progressistes, féministes et universalistes et pour sa défense des principes laïques émancipateurs. Ses livres sont appréciés par tous les militants laïques. Dans le cadre de la lutte qui se déroule actuellement en Europe pour reconfessionnaliser et communautariser les sociétés civiles et politiques, le combat de Nadia Geerts dérange.
C’est ainsi qu’en octobre 2020, trois anciens étudiants l’ont soudain accusée simultanément sur les réseaux sociaux de racisme et d‘islamophobie en contestant publiquement son droit à enseigner. Très vite, le Conseil Étudiant[2] de l’école et certains enseignants se sont joints de fait à ses harceleurs.
La direction de l’école, tout en reconnaissant que jamais personne ne s’était plaint de son prétendu racisme ou de sa prétendue islamophobie, n’a rien fait pour stopper l’escalade. Ce n’est que deux mois plus tard qu’un message de soutien a été publié, cosigné avec réticence par le Collège de Directions et le Conseil Étudiant.
À partir de la mi-janvier 2021, Nadia Geerts a reçu des dizaines de messages publics haineux, menaçants et diffamatoires, l’accusant entre autres de donner de moins bonnes notes aux étudiants « trop basanés ». Le Conseil Étudiant apportait alors sa caution à cette assertion diffamante…
La directrice-présidente de la Haute École s’est toujours abstenue de faire connaître le rôle du Conseil Étudiant dans ce que l’enseignante subissait. De même, malgré la demande pressante de plusieurs collègues, la direction refusa de fournir des informations sur ce qui arrivait à Nadia Geerts lors de l’assemblée générale des professeurs, fin janvier. Silence coupable…
Nadia Geerts a désormais demandé sa mutation dans un autre établissement.
Voici donc ce que subissent les « premières lignes » de la liberté de conscience, de la liberté d’expression et de la lutte pour la liberté d’enseignement, en Europe occidentale au XXIe siècle. Il est plus que temps que les gouvernements et les administrations qu’ils dirigent mettent fin à ces menées destinées à faire taire les porteurs de Lumières au profit d’un retour de l’obscurantisme et du délit de blasphème.
Les voyous qui persécutent Mila sont restés scolarisés ; l’adolescente qui a causé la mort de Samuel Paty par ses mensonges est toujours scolarisée ; les extrémistes qui menacent ce professeur de Lyon et Didier Lemaire, les émeutiers qui veulent la mort de B. Denville en Angleterre, sont libres de leurs mouvements ; les harceleurs de Nadia Geerts agissent en toute impunité.
Mila, elle, doit vivre sous protection. Samuel Paty est mort décapité. L’enseignant anonyme de Lyon, Didier Lemaire, B. Denville, Nadia Geerts, ont dû démissionner et pour certains fuir la mort qui leur est promise. Ces victimes de la haine et tant d’autres qui se taisent ou auxquels on impose de se taire au nom de la paix civile, ne doivent plus être sacrifiés sur les autels des fanatiques.
Nous demandons à l’Union européenne, aux gouvernements nationaux, et particulièrement au gouvernement français, de garantir la liberté et la tranquillité de ces héros du quotidien et de frapper avec la plus grande sévérité les assassins par destination qui les persécutent. La peur, la mort ne doivent plus être la seule perspective de ces citoyens qui veulent simplement vivre selon les lois de nos pays.
Nos pensées vont aussi à Zineb El Rhazoui, Philippe Val et à tous les journalistes de Charlie.
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[1] En Belgique, une haute école est un ensemble d’établissements supérieurs qui dispense un enseignement de type court ou de type long.
[2] Le Conseil des étudiants (CE) représente les étudiants.