Pour une première, c’est une première !
Par Anne Salzer pour le Bureau d’Unité Laïque
Le juge des référés du Conseil d’État, notre plus haute juridiction administrative, était saisi pour la première fois d’un recours dans le cadre du nouveau « déféré laïcité » issu de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.
Rappelons l’article 5 de cette nouvelle loi qui modifie l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, disposant désormais : « Lorsque l’acte attaqué est de nature (…) à porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics, le président du tribunal administratif ou le magistrat délégué à cet effet en prononce la suspension dans les quarante-huit heures. La décision relative à la suspension est susceptible d’appel devant le Conseil d’État ».
Saisi donc d’un appel de la ville de Grenoble sur la décision des premiers juges du Tribunal administratif de Grenoble ayant sanctionné la décision de son conseil municipal ayant autorisé le port du burqini au sein des piscines municipales, le juge des référés du Conseil d’État a confirmé cette suspension en estimant que la dérogation très ciblée apportée aux règles de droit commun de port de tenues de bain près du corps édictées pour des motifs d’hygiène et de sécurité, pour satisfaire aux revendications religieuses (sans la préciser et que nous qualifierons de courants islamistes) est de nature à affecter le bon fonctionnement du service public et l’égalité de traitement des usagers dans des conditions portant atteinte au principe de neutralité des services publics.
C’est un coup de frein, un coup d’arrêt même aux initiatives, aux dérives de maires écologistes et progressistes autoproclamés, adoptant des règlements intérieurs pour leurs piscines au profit d’idéologues salafistes diffusant un islamisme rampant, imposant le port du voile et du burqini aux femmes, comme une « liberté » pour elles et celles des autres, selon eux et selon ces partis d’une gauche à la dérive méprisant notre laïcité pour des raisons électoralistes voire idéologiques.
Le juge des référés du Conseil d’État rappelle la jurisprudence selon laquelle le gestionnaire d’un service public a la faculté d’adapter les règles d’organisation et de fonctionnement du service pour en faciliter l’accès, y compris en tenant compte des convictions religieuses des usagers, sans pour autant que ces derniers aient un quelconque droit qu’il en soit ainsi, dès lors que les dispositions de l’article 1er de la Constitution interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers. C’est un coup de frein à l’entrisme religieux « à bas bruit » sous toutes ses formes au nom d’une liberté de conscience, rappelée certes par l’article 1er de notre Constitution, que le Conseil d’État cite à juste titre, mais trop souvent galvaudée. D’ailleurs, la jurisprudence européenne est elle aussi de plus en plus restrictive sur l’application de cette liberté (que ce soit au sein de la CEDH que de la CJUE)
Le Conseil d’État rappelle aussi que l’usage de cette faculté d’adaptation des règles ne doit pas porter atteinte à l’ordre public ou nuire au bon fonctionnement du service. Par son ordonnance sanctionnant la décision de la Ville de Grenoble sur l’autorisation du burkini, le Juge rappelle son rôle de dire le droit et ainsi faire obstacle à des adaptations qui, par leur caractère fortement dérogatoire aux règles de droit commun et sans réelle justification, rendraient plus difficile le respect de ces règles par les usagers ne bénéficiant pas de la dérogation ou se traduiraient par une rupture caractérisée de l’égalité de traitement des usagers, et donc méconnaîtraient l’obligation de neutralité du service public.
Ainsi, le Juge redonne son sens et ses couleurs au principe de neutralité des services publics au profit de tous les usagers et l’égalité de traitement. Le sens de l’État, le sens de notre république laïque.
Liberté, égalité, fraternité, laïcité !
Pour une République indivisible, laïque, démocratique et sociale.