Robert Badinter au Panthéon, une vie pour la République
Robert Badinter, décédé le 9 février 2024, entrera au Panthéon ce jeudi 9 octobre 2025. Il trouvera sa place auprès des glorieux Grands Hommes qu’il aimait tant citer au gré de ses combats. Son cénotaphe reposera dans le caveau des révolutionnaires au côté de celui de Condorcet, le philosophe des Lumières, qui concilia souveraineté populaire et droits de l’homme.
Victor Hugo, dont les textes ont nourri ses lumineuses plaidoiries contre la peine de mort, Voltaire, Zola étaient les incarnations, pour ce fils d’émigré juif moldave, comme pour nombre de persécutés à travers le monde, de la nation universelle, du pays de la promesse de l’égalité et de la citoyenneté pleine et entière.
Robert Badinter a consacré sa vie à combattre l’injustice, à défendre la dignité humaine et la République. Il a fait voter par l’Assemblée nationale, comme ministre de la justice de François Mitterrand en 1981, la loi portant abolition de la peine de mort. Ce ne fut pas son seul combat. Jusqu’au bout, il s’est battu pour porter haut les valeurs de la République et l’universalisme républicain.
Ses prises de position pour mettre fin aux discriminations dont souffraient les homosexuels, dans une France qui peinait à s’émanciper de la morale vichyste, ont contribué à rendre plus tangibles les termes de l’article 1 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ».
Marqué par son histoire familiale, sa grand-mère est morte à Auschwitz et son père à Sobibor, il n’a cessé de combattre l’antisémitisme. En 1981, à Robert Faurisson, l’agrégé de lettres notoirement antisémite et négationniste, Robert Badinter, le fils de déporté, lançait : « Avec des faussaires, on ne débat pas, on saisit la justice et on les fait condamner. » Cette phrase résonne avec force alors que les actes antisémites se multiplient, que les appels à la haine se font chaque jour plus désinhibés dans une France tétanisée par les intimidations des uns et la pusillanimité des autres.
Au côté de son épouse, Élisabeth Badinter, il a été un militant et un pédagogue de la laïcité. Il est intervenu sur la scène publique chaque fois qu’ il sentait que celle-ci pouvait être menacée. Ses mots sont précieux alors que nous nous apprêtons à commémorer le cinquième anniversaire de l’assassinat de Samuel Paty.
Ainsi, en 2020, au soir de sa vie, Badinter lui rendait hommage en rappelant que la laïcité, la fraternité et à la liberté d’expression étaient consubstantielles à notre République : « Il n’existe pas dans la République de religion d’Etat ou de religion officielle. C’est pourquoi en France, l’École de la République est laïque car la laïcité garantit à tous les élèves et à tous les niveaux, un enseignement consacré au seul culte du savoir et de la recherche qui forgent les esprits libres et ouverts au monde ».
Robert Badinter : un grand homme, un combattant, un homme dont la droiture, l’intelligence et l’attachement à la République justifient pleinement l’hommage national et l’entrée au Panthéon, ce haut lieu de la mémoire de la nation française.
Il aura fallu, au jour de son entrée au Temple de la Nation, que sa pierre tombale soit souillée par la haine. Cela ne fait qu’affermir notre résolution d’être dignes de lui pour défendre la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité.
