L’école des jeûnes. Du grignotement des libertés au nourrissement des croyances

L’administration d’un collège de la banlieue parisienne, plus radicale que l’islam lui-même, propose aux familles musulmanes d’aller encore plus loin dans l’intégrisme religieux que ne le stipulent Coran et Hadiths.

Nulle part en effet il n’y est prescrit de contraindre des enfants prépubères à jeûner durant le ramadan. Consternation, colère, incrédulité ou indignation, que dire et ressentir face à cette énième violation du principe de laïcité dans le lieu même qui l’a vu naître ?

Les faits

  • Une note envoyée aux parents d’élèves, émanant du principal d’un collège.
  • Note concernant uniquement la période du ramadan

Le dit et le non-dit de la note 

  • Proposer un régime d’externat aux élèves musulmans pour qu’ils puissent jeûner le midi durant le ramadan.
  • Favoriser – voire encourager – cet aménagement en réduisant les frais de demi-pension.
  • Collecter indirectement des données religieuses sur des familles et des élèves.

Ce qui fait scandale

  • Atteinte au principe de laïcité. Il s’agit d’un établissement public laïque dans lequel des pratiques religieuses n’ont pas à être prises en compte pour accommoder une partie de la population scolaire aux dépens de ceux qui ne les partagent pas.
  • Atteinte à la valeur d’égalité constitutive du principe de justice sociale. Cette mesure entraîne une rupture d’égalité intolérable entre les élèves, par le biais d’une discrimination financière privilégiant les parents adeptes d’une religion au détriment de ceux ayant d’autres convictions et croyances.
  • Atteinte au principe d’unité et d’indivisibilité républicain. Le fichage religieux des élèves et de leurs parents qui s’ensuit – contraire à la loi informatique et libertés – encourage la fracturation d’une communauté éducative soudée en communautés identitaires multiples.
  • Atteinte aux valeurs d’une République démocratique reposant sur la liberté, l’égalité et la fraternité.
  • Atteinte à la liberté de conscience. S’il est encore besoin de le redire, « l’État protège la liberté de conscience des élèves » et « les comportements constitutifs de […] tentatives d’endoctrinement des élèves sont interdits dans les écoles publiques et les établissements publics locaux d’enseignement […]». [Code de l’Éducation – art. L141-5-2 ; loi n°2019-791-art10].

Cette liberté absolue de conscience qui constitue le socle des libertés fondamentales de penser et d’exprimer son opinion, apanages du citoyen éclairé que l’école publique aspire à voir grandir en son sein, est ici bafouée ostensiblement. L’élève mineur et prépubère y est ici contraint de subir une décision religieuse de jeûne, prise par sa famille, et cautionnée par le principal du collège lui-même. Dogmatisme, négligence coupable, ou inconscience de la part de ces adultes qui en ont la responsabilité parentale ou institutionnelle ?

  • Atteinte à la loi française. Famille, école et État se doivent de protéger l’enfant. Or la pratique du jeûne religieux du ramadan est contraire à ce que stipule le Code Civil Article 371-1 – Modifié par LOI n°2019-721 du 10 juillet 2019 –
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  •  art. 1.  Ce n’est pas en le privant de nourriture et d’eau que l’on agit « dans l’intérêt de l’enfant » et qu’on lui « accorde le respect dû à sa personne », ou encore que l’on exerce une autorité sans violence physique ou  psychologique. Ce qui peut aller jusqu’à être jugé maltraitance coupable de la famille peut aussi être qualifié de non-assistance volontaire à enfant en danger à l’encontre de l’établissement scolaire.
  • Atteinte à la fraternité. Ficher les enfants eux-mêmes de cette manière, au su de tous, c’est comme les pointer du doigt dans la cour du collège, les stigmatiser comme bénéficiaires d’un favoritisme indu, et peut-être même les désigner comme futures victimes de harcèlement par ceux qui ne jouissent pas des mêmes privilèges. Mais c’est aussi courir le risque inverse de générer ou conforter un affrontement communautaire entre coreligionnaires, parents ou enfants, entre musulmans intégristes et musulmans éclairés.  Le dogme n’a aucune place dans les établissements publics laïques d’enseignement.

Dans ces atteintes aux principes et valeurs de la République, c’est toujours la laïcité qui est le bouc émissaire des haines et des fanatismes. Elle est pourtant le seul rempart qui puisse désormais protéger les élèves de nos écoles et de nos collèges en leur offrant cette respiration laïque dont ils ont tant besoin pour acquérir autonomie, esprit critique et responsabilité. Ne laissons pas le silence de la connivence, du prosélytisme honteux ou de la lâcheté étouffer les rires et l’innocence de l’enfance sous l’empire des croyances.

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